Erno Renoncourt
Nous voici de retour, avec la deuxième partie de notre raisonnance consacrée à la cartographie des métamorphoses indigentes du leadership haïtien. Empressons-nous de dire deux choses à ceux et celles, nombreux parmi les Haïtiens, qui nous reprochent de dénigrer la population haïtienne, et de faire le jeu de ses ennemis, en mettant à nu les médiocrités de sa culture. Á ceux-là nous disons : D'une part, accepter de se voir dans son horrible laideur n'est pas une faiblesse, mais une étape introspective courageuse et indispensable pour entreprendre la voie de sa régénération. Car toute régénération authentique passe par la prise de conscience de sa dégénération. Et dans cette perspective, il n'y a pas bouc émissaire et d'ennemi extérieur. Le vrai et seul ennemi d'un collectif qui s'auto-déshumanise est son refus de remettre en question les comportements déviants qui lui servent de quantificateurs de réussite. D'autre part, l'indigence n'est pas une spécificité culturelle du shithole haïtien, mais une défaillance humaine universellement partagée, mais qui se manifeste de manière contextuelle selon la déliance naturelle et structurelle du lieu où elle émerge. En conséquence, contrairement à ce que pensent certains Haïtiens, nous ne condamnons pas à tout jamais la population d'Haïti, en expliquant son impuissance devant son invariante déshumanisation par sa culture de marronnage déviant. Du reste, la culture étant un construit social, elle peut être déconstruite et reconstruite, dans le temps. Mais encore faut-il être capable d'identifier et d'avoir le courage d'assumer le bug anthropologique pour pouvoir reconstruire la superstructure culturelle sur des infrastructures plus éthiques et pour des perspectives de vie plus dignes et plus résilientes. Comme aurait dit Frédéric Lenoir : « plutôt que de réagir [avec malice te fourberie] face aux événements [de la vie], essayons de les comprendre. Lorsque nous aurons compris que tout a une cause et que nous aurons saisi l'enchaînement des causes à la base de tel événement naturel ou de telle action humaine, nous ne serons plus dans l'insignifiance et dans l'impuissance, ni devant les actes odieux et monstrueux des hommes, ni devant les catastrophes tragiques de la nature » (Frédéric Lenoir, Le miracle Spinoza. Une philosophie pour éclairer notre vie, Fayard, 2017, p.9) C'est pour parler plus longuement, et de manière plus pédagogique, de l'enchaînement des causes entre culture de la malice, insignifiance cognitive et errance anthropologique que nous avons du temps pour traiter cette tribune dans une problématique qui relie le local et le global.
Une mise en contexte historique et systémique
Le point de départ de notre problématique est qu'il est un peu simplifiant de persister à expliquer la situation, impuissante et erratique, actuelle d'Haïti en se référant à son histoire comme lieu d'exploitation. Aussi lourd que soit le poids du passé esclavagiste dans le présent, il n'est pas moins vrai que celui-ci est aussi le résultat de la résistance que le collectif, qui a hérité de ce passé, a offert et continue d'offrir pour se libérer des sangles qui le verrouillent sur ce passé. Quand ce collectif utilise les solutions du passé (marronnage, malice, violence aveugle) pour ses réussites (politiques, économiques, académiques) dans le présent, alors que les contextes du passé (collectif déshumanisé, dépendance) et du présent (collectif ressurgi dans son humanité, indépendance) n'ont rien en commun, malgré l'invariance des défaillances, il crée lui-même des boucles de récursivité qui font perdurer les problèmes du passé en y ajoutant ceux du présent. Ce qui logiquement bloque les voies vers d'autres possibles pour le futur. C'est du reste la première des 11 lois de la pensée systémique qui nous dit ceci : Les problèmes d'aujourd'hui viennent des solutions d'hier ; puisque, la complexité aidant et le contexte variant, les mêmes causes ne produisent pas toujours les mêmes effets. Ainsi, les solutions (marronnage, malice, violence aveugle) trouvées aux problèmes (déshumanisation, barbarie, exploitation) du passé peuvent ne pas convenir aux problèmes (invariance, défaillance, errance) du présent, malgré leur ressemblance (déshumanisation).
De ce point de vue systémique, l'histoire ne suffit donc pas comme axe déterminant de causalité pour expliquer l'évolution d'une société. Il faut plus rigoureusement constituer un repère multidimensionnel dans lequel interviennent, les axes qui orientent sur les finalités (intentionnalités, culture, imaginaire) et qui décrivent la constitution (structure et fonctionnement) des groupes et des individus qui forment cette société. L'histoire s'impose alors davantage comme le récit de cette évolution, plutôt que comme la cause de cette évolution. Cela étant rappelé, il faut garder à l'esprit que les métamorphoses culturelles des groupes sociaux dominants haïtien, pour indigentes qu'elles soient, ne sont que des répliques contextuelles des métamorphoses culturelles indigentes des élites globalistes de l'Occident.
C'est en tout cas une donnée factuelle que confirment les évènements géopolitiques qui se déroulent actuellement sur les différents échiquiers de la planète. Donnée de reliance qui tend à confirmer le postulat morinien de la pensée complexe : tout esprit, incapable d'organiser et de relier les informations auxquelles il accède dans une pensée globale pour définir des actions locales (Edgar Morin, Les sept savoirs nécessaires à l'éducation du futur, p.35, Seuil, 2000), est aveugle, inconscient, et irresponsable (Edgar Morin, La tête bien faite, p.15, Seuil, 1999). C'est dans le prolongement de cette invitation à ''penser global pour agir local'' que se situe notre raisonnance sur l'errance haïtienne.
Pas étonnant que notre démarche soit si incomprise, puisque, majoritairement, l'opinion publique, tant locale que mondiale, a tendance à arc-bouter aux contenus des médias officiels et aux analyses (subventionnées) des experts de service, ''dont le travail consiste à réécrire les faits selon la version officielle'' du grand barbare occidental. Quoi qu'il en soit, avec l'assumation d'être une voix minoritaire, nous insistons à vulgariser notre raisonnance atypique pour dire l'errance haïtienne plus courageusement, plus scientifiquement, en tenant compte de l'état actuel des savoirs.
Nous sommes convaincus qu'on ne peut décrire intelligiblement la trajectoire de l'errance haïtienne qu'en tenant compte de cette reliance entre le local et le global. Cette intelligibilité est indispensable, car c'est elle qui permettra de trouver le centre d'intérêt partagé, à partir duquel il faudra, dans un équilibre transformationnel, construire l'angle stratégique pour repenser la gouvernance d'Haïti. Mais cela ne peut se faire qu'en rupture des postures actuelles du collectif haïtien lesquelles sont des projections de son imaginaire sur le plan de son territoire. Il ne s'agit pas d'un récit en quête de boucs émissaires à haïr ou de héros improbables à glorifier. Il s'agit de responsabiliser un collectif par rapport au sacrifice et courage qu'exige la prise en mains de son destin.
Cette perspective s'avère d'autant plus prometteuse qu'on peut constater que les évènements mondiaux actuels, sur les différents théâtres du monde, sont rythmés par une même onde de terreur spiralée. Obscure et ténébreuse, chargée de précarités déshumanisantes et d'incertitudes terrifiantes, elle imprime sa marque indigente dans la conscience collective universelle. Une même impuissance tétanise et fossilise les peuples un peu partout dans le monde. Ironiquement, ceux qui les tyrannisent et les déshumanisent jouissent d'une impudente impunité auprès des capitales occidentales qui se sont autoproclamées championnes des droits de l'homme et de la justice. Et même l'opinion publique occidentale sympathise avec les fossoyeurs et les génocidaires du genre humain, puisque c'est dans un silence assourdissant et angoissant, que le monde assiste à l'extinction de ces peuples, pris en otage, et dépossédés de leur dignité par les intérêts mafieux et criminels qui gouvernent le monde.
Impunité et silence ne sont-elles pas des signes éloquents de complicité quand le destin d'une partie du genre humain est en jeu ? Cette indifférence totale vis-à-vis de la souffrance des populations d'Haïti, de Gaza et des autres ailleurs déshumanisés n'est-elle pas la preuve que nous entrons dans les tourbillons d'une spirale indigente, sous l'influence de laquelle le monde se recroqueville sur ses savoirs faire barbares, tout en priorisant son insatiable engouement pour l'abondance. Et oui, l'indigence est bien là. Pendant qu'Haïti et Gaza se désintègrent à vue d'œil, dans une souffrance insoutenable induite par une terreur piloté par le même démiurge e, gangstérisme transnational et mise en quarantaine pour les Haïtiens, terrorisme transnational et famine pour les Gazaouis, et oui, disions-nous, pendant ce temps, l'Occident, si enclin à brandir les étendards de l'interventionniste humanitaire au nom de la liberté et des droits humains, détourne les yeux et accélère sa réécriture des faits pour mieux affirmer son emprise totalitaire sur le monde. Effroyable perspective pour l'humain et sa dignité !
Á l'horizon de la vie des peuples se propage le spectre d'un rayonnement obscur et ténébreux. Profondément angoissant, il s'accompagne d'une sourde terreur orchestrée par des monstres politiques locaux, fabriqués et téléguidés par l'Occident, dans des nuits électorales porteuses des éternels projets aliénants et déshumanisants. Réel, mais plus hideux qu'imaginé, le clair-obscur, évoqué par Antonio Gramsci, s'épaissit du côté obscur, s'enfume et voile l'éclaircie qui animait fébrilement l'espérance vers des lendemains dignes, par l'irradiance de la vérité et de la justice. Dans cet enfumage incommodant et étouffant, l'aube n'a jamais été plus lointaine et hypothétique pour les veilleurs des lendemains dignes, tant l'obscurité reste dense et prégnante aux frontières de l'humain. Tout se ternit d'une intense obscurité, tout résonne de fausseté, tout frémit d'indignité, tout se meut dans une même difformité et tout vibre d'une même inhumanité.
Réquisitoire contre l'imaginaire malicieux et défaillant
En certains lieux, comme Haïti, cela prend des proportions outrageusement alarmantes. Car, ici, même en temps normal, tout s'affaisse et s'incline vers le cycle bas de la vie, qui transforme la sur-vie en sous-vie. Or, maintenu, en permanence, par le poids des précarités, sous les eaux marécageuses, l'homme ne peut plus ressurgir par sa pensée. Son esprit ne s'élevant plus vers les sphères hautes de l'imaginaire irradiant, il ne se révolte plus, ne s'indigne plus, ne colère plus. L'être coupé de ses colères dignes, ne peut que s'adapter médiocrement au destin qui l'écrase et l'entraîne, comme un fossile, il flotte, à dignité abattue, et dérive, à humanité désintégrée, vers les abysses obscurs et putrides de l'impuissance. Pour survivre dans cette invariance, l'homme a dû se métamorphoser dans des postures immondes, laissant éroder son intelligence pour faire de la place aux ressources de sa subsistance.
Dans un lieu originellement précarisé et structurellement entretenu pour être invariablement hostile pour la population qui désire s'y enraciner, quand l'imaginaire collectif est défaillant, la fuite, la malice, la crapulerie, la couillonnerie, l'irresponsabilité, l'indignité et la servilité deviennent des postures d'adaptation assumées pour arpenter médiocrement l'existence. Car tout lieu entretenu séculairement comme fumier, pour étouffer la dignité, tend à prendre des attraits de maquis éternel pour ceux et celles qui, incapables de le transformer à partir de ses ressources contextuelles, se résignent à survivre en s'adaptant à sa déliance. Et nous allons montrer que ces postures déviantes s'expliquent intelligiblement par la défaillance de l'imaginaire collectif. Car celui-ci, façonné par l'appropriation des enseignements des expériences passées, s'impose comme le prisme, ou le miroir à travers lequel une société se projette dans l'avenir.
L'imaginaire social est donc un construit qui permet à un collectif de donner sens aux évènements qu'il expérimente pour mieux s'orienter dans la vie. En ce sens, l'imaginaire reflète le niveau d'apprentissage grâce auquel un collectif construit sa relation avec son écosystème par le biais de symboles et de codes culturels. Quand ce collectif apprend de ses expériences, et cherche sans cesse à se régénérer pour innover son écosystème, son imaginaire s'agrandit et s'embellit. Mais, quand au contraire, il fuit et contourne les incertitudes de son écosystème, il désapprend, et conséquemment son imaginaire s'enlaidit et dépérit. L'imaginaire social s'institue donc comme un héritage générationnel, chaque génération peut le fructifier ou le dilapider. Dans le cas haïtien, il semble que de génération en génération, la tendance à la dilapidation est une constante culturelle.
L'impuissance de la population haïtienne devant les incertitudes de son écosystème, invariablement déliant et défaillant, n'est-elle pas le bilan intergénérationnel de l'appauvrissement de l'imaginaire de ce collectif déshumanisé qui ne se situe sur son territoire que par un éternel déracinement ? L'imaginaire collectif haïtien ne s'est-il pas objectivement enlaidit dans le temps, quand chaque génération laisse sa conscience résonner dans la culture médiocre du Pito nou lèd nou la (Mieux vaut être laid, mais vivant) et du Sa je pa wè kè pa tounen (Ce qui ne se voit pas ne trouble pas le cœur) ? Quand, au lieu de faire l'effort cognitif et éthique pour refuser la laideur, assumer de voir ce qui révulse le cœur pour mieux le rejeter, apprendre à se régénérer pour affronter autrement que par la fuite les incertitudes de son écosystème, un collectif préfère les fuir ou s'en adapter médiocrement, au prix de toutes les laideurs et de toutes les indignités, n'est-ce pas un glissement permanent vers l'appauvrissement de son imaginaire ? N'est-ce pas son apprentissage qu'il bloque ?
C'est en tout cas ce qu'on peut déduire de cette citation d'Antoine de Saint Exupéry : « L'Homme se découvre quand il se mesure à l'obstacle » ? Quand il le fuit, le contourne ou l'entretient comme opportunité d'affaires, il s'interdit d'apprendre et de découvrir comment devenir meilleur. C'est donc en ce sens qu'il faut contextualiser la définition kantienne de l'intelligence comme étant la mesure de la quantité d'incertitudes qu'un individu ou qu'un groupe social est capable de supporter afin de trouver comment réduire l'entropie à la base des incertitudes.
C'est donc en termes d'imaginaire qu'il faut systémiquement poser le problème de l'errance haïtienne.
Sans imaginaire étincelant, nul ne résiste à un écosystème invariablement déshumanisant. Quand, le temps s'écoulant, l'esprit devient confortable dans les lignes de basses eaux de la médiocrité, l'être, dont l'imaginaire est fissuré, voit dans les médiocrités, non un défi que son intelligence doit relever, mais une opportunité pour sa subsistance ou son abondance. C'est ainsi que la malice, comme posture de marronnage déviant, interdisant l'apprentissage, est devenue, en Haïti, de génération en génération, une valeur sûre, un gain épigénétique à transmettre. Ainsi, ce gain épigénétique (acquis par l'adaptation à un environnement précarisé) s'est imprimé dans le code anthropologique local et a été transmis culturellement de génération en génération. Dans un lieu entretenu comme fumier invariant, sans imaginaire flamboyant pour chercher une brèche et y faire entrer de l'air pur et dissiper l'enfumage, on ne survit qu'en improvisant des postures de malice pour tromper tout le monde.
C'est ce naufrage de la pensée, par l'autoroutage de l'intelligence vers la malice, qui maintient le corps social haïtien dans son enlisement séculaire boueux et vertigineux. L'indigence apparaît donc comme la posture défaillante d'un être ou d'un groupe social dont l'humanité a été effondrée et qui s'interdit de se reconstruire par l'apprentissage, car ayant pris goût et plaisir à ne percevoir l'autre qu'à travers le prisme déformant de son univers déshumanisé. Les concepts d'intelligence, de vérité, d'altérité, de justice, de dignité et d'humanité n'ont plus de sens pour cet être métamorphosé, lequel ne peut plus arpenter la vie qu'à travers un masque pour mieux cacher son inhumanité.
Mais Haïti est loin d'être le seul lieu où cette métamorphose, par érosion d'humanité, a émergé. Il suffit de regarder les comportements des dirigeants Occidentaux, dans leur jeu mécréant avec la vie humaine, que ce soit à Gaza, en Ukraine ou en Haïti, où la performance de leur stratégie est un récit invariant de duperie, de tromperie et d'escroquerie, pour comprendre que l'indigence est une défaillance humaine mondialement partagée. Mieux encore, l'indigence s'impose comme un glissement de la conscience vers les basses eaux éthiques ; et c'est pourquoi, elle vient toujours des couches sociales aisées, lesquelles, à la manière d'un Procuste, impriment leur inhumanité à ceux et celles qui les côtoient. C'est donc là qu'il faut se situer, sous l'angle de la défaillance humaine, pour comprendre les liens entre l'indigence haïtienne et l'indigence universelle.
Et ce ne sont pas les récents évènements mondiaux, qu'ils aient lieu à Gaza (invisibilisation du génocide palestinien), en Ukraine (instrumentalisation de l'Ukraine comme État terroriste pour les intérêts de l'empire) ou en Haïti (exploitation des gangs comme menace terroriste pour poursuivre la déshumanisation de ce collectif jusqu'au bout de son extinction).
Humaine défaillance
Manifestement, entre notre dernière publication sur ce site, le 19 mai 2025 ( legrandsoir.info), et celle-ci, (6 juin 2025), beaucoup de choses se sont produites dans le monde. Les théâtres politiques, tant globaux que locaux, brûlent sous les feux indigents des stratèges du chaos et des architectes de la déshumanisation. Le marionnettiste en chef, dans son rôle de Grand Barbare, gardien de l'abondance de l'empire, semble avoir lâché les fils des marionnettes locales qu'il manipulait jusque-là par l'interface du business de l'état de droit. Mais, comme en tout business, quand le cycle du produit décline, l'entrepreneur intelligent se désengage, et se consacre à prospecter d'autres produits ou d'autres services, afin de rester maître du marché. Cependant, quand le savoir-faire est limité, parce que régulé par un imaginaire déficient, cet entrepreneur ne peut que créer un contexte qui lui permettra de recycler les mêmes vieux produits, en changeant leur emballage et leur étiquetage.
Ainsi, partout sur la planète, l'internationale humanitaire, conçue originellement pour assister er renforcer l'état de droit, se métamorphose en une internationale de terreur. En effet, contrainte de protéger les intérêts de l'empire qui vacillent sur des incertitudes, l'Occident renoue avec la barbarie qui est l'essence de sa culture ; autrement dit l'extermination des autres qu'il ne considère pas comme faisant partie de sa conception de l'humanité. Gaza/Palestine, Ukraine/Russie, Haïti/Afrique sont les théâtres d'évènements terrifiants qui mettent en évidence la métamorphose par laquelle l'Occident révèle son humaine défaillance.
Mais cette métamorphose indigente a ceci d'inquiétant, qu'elle menace les fondements mêmes de l'humain. Ainsi, autant la population d'Haïti se rapproche d'une extinction anthropologique par une gangrène terroriste instrumentalisée, autant la population de Gaza est en train d'être génocidée par l'impunité dont jouit Israël autant le monde se précipite vers l'apocalypse nucléaire par l'instrumentalisation de l'Ukraine comme État terroriste. Partout le même grand barbare occidental perdure son double jeu : il sécrète le chaos en amont, et il joue en aval les pacificateurs ou les sauveurs. Comme si tous les évènements locaux et globaux, d'ici et d'ailleurs, étaient reliés par le fil conducteur reliant une mécanique occultée, mais réglée par le tic-tac d'un temps qui sonne le glas de l'humanité.
Et si 2025 était la clé temporelle du code orwellien 2+2=5. Code qui, par-delà les interprétations erronées d'une critique du totalitarisme stalinien, cherchait à nous rappeler, par l'imminence de la toute puissance du ministère de la vérité (l'intelligence artificielle), que rien n'aura plus de signifiance. Vous souvenez-vous, lecteurs, lectrices, qu'en 2024, je vous avais donné rendez-vous en 2025 pour décoder le mystère de l'équation insensée 2+2=5 du roman prophétique 1984 de George Orwell ( legrandsoir.info) ? Nus revoici donc, puisque tout dans ce temps nous ramène à une même évidence : le grand barbare occidental prépare son nouveau banquet de la déshumanisation pour ressurgir dans de nouvelles impostures et maintenir ses structures barbares invariantes. Mais cela ne peut se faire qu'au prix d'une sanglante érosion d'humanité et de perte de sens.
2+2=5, n'est-ce pas une métaphore arithmétique pour nous faire découvrir la vérité de l'insignifiance cognitive qui prend possession de notre monde, malgré les progrès technologiques ? Quand l'indigence automatisée (IA) émerge par la médiation de l'intelligence artificielle (IA), les signes n'ont plus de sens, puisque l'humain n'a plus besoin de repères intelligibles pour penser par lui-même ! Un plus (+), un moins (-) et un égal (=) peuvent, à volonté, se ramener à un élément neutre ou nul.
Le temps de l'indigence s'apparente donc bien à celui dans lequel nous entrons en cette fin du premier quart du XIX ème siècle, conscience effondrée sur le cul anobli et glorifié (voir notre avatar de la spirale de l'indigence). Temps du renoncement au sens, temps du mensonge imposé comme vérité médiatisée. Plus besoin de mobiliser ses sens pour apprendre à construire le sens qui oriente, par l'intelligence, découlant des expériences humaines, le sens de la vie. Temps de l'insignifiance élue, puisque par la puissance computationnelle vertigineuse de l'intelligence artificielle, le ministère de la vérité a désormais réponse à tout.
Ainsi, sur le théâtre global, le banal et fatal se côtoient dangereusement : un « train sniffe » dans la nuit kiévienne, et à son bord trois passagers, co-belligérants de la guerre de l'Otan contre la Russie, jouent à cache cache avec un mouchoir précieux. Il faut dire qu'il est subtilisé subrepticement d'un geste si vif aux regards indiscrets, et est glissé si discrètement dans une poche de polo, comme un produit illicite et interdit, qu'on se demande s'il ne contenait pas le nom de code de l'attaque des bases nucléaires de la Russie qui a eu lieu le 1er juin 2025 ? Mais la malice collective a voulu y voir un sachet de cocaïne. Et pour cause ! Les trois passagers fous furieux sont tous fichés chez les consommateurs de substances hallucinogènes. Et plus tard quand une « Brigifle » fait son amortissement brutal sur une gueule jupitérienne, à l'ouverture de la porte d'un avion à Hanoï, l'inertie du mensonge, comme stratégie de communication, oblige à démentir le fait, puis à tenter de le réécrire comme la caresse médiatiquement mise en scène d'un couple énamouré. Bref, c'est bien connu que par saisons d'humaine défaillance, la vérité n'est que mensonge et le mensonge est la vérité. Plus rien n'a de sens.
Entre temps, sur le théâtre local haïtien, dans le prolongement de la reconnaissance des gangs comme groupes terroristes transnationaux, la population haïtienne est décrétée menaçante pour la sécurité des États-Unis. Or, dans le même temps, mais dans un autre lieu, les médias immortalisent la posture courbée du terroriste en chef du nouveau régime en Syrie, qui voue allégeance et confie sa maison au Parrain du Big Gang (Le grand barbare occidental). Toujours en Haïti, Alors que les gangs de rue, décrétés terroristes transnationaux par les États-Unis, sont approvisionnes en armes et munitions par ce même pays, le gouvernement domestique haïtien, installé par les États-Unis, fait appel aux mercenaires américains de Blackwater pour lutter contre les gangs sans garantie de protection de la population. Et comble d'insignifiance, alors qu'un puissant chef de gang haïtien figure parmi les criminels les recherchés par les États-Unis, c'est le puissant média américain CNN qui vient jusqu'en Haïti pour l'interviewer. Alors même que l'ex ambassadeur des États-Unis ne s'était pas gêné dans une entrevue publique pour dire qu'il entretenait de bonnes relations avec ce chef de gang pour garantir la sécurité du personnel diplomatique et consulaire américain en Haïti.
Qui peut, sans imaginaire flamboyant, dans cet univers de dissimulations, où tout évolue à perte de sens, discerner le mensonge de la vérité ? Or, sans ce discernement, comment connaitre les causes des maux pour interagir intelligemment avec son environnement ? C'est justement le but de la terreur, maintenir l'imaginaire collectif sous les eaux de la peur pour entretenir la défaillance humeur par l'insignifiance cognitive. Comme le postule Spinoza, c'est la quête de sens qui nourrit la connaissance et ouvre la voie au changement, à l'action intelligente et à la liberté. Comme nous le montrerons dans la partie 3, en nous appuyant sur le cas haïtien, c'est bien l'insignifiance cognitive qui, par renoncement à la quête de sens, entretient l'errance.